Alors que les discussions reprennent mardi en Arabie saoudite entre Américains et Ukrainiens, les responsables militaires de 30 pays de l’UE ou de l’Otan sont réunis à Paris pour discuter de leur soutien à Kiev, et se préparer à pallier l’aide américaine. Des discussions que la Russie observe sans prendre le moindre engagement vers la paix.
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Des enjeux à tous les niveaux et des discussions au sommet, à quelques milliers de kilomètres de distance. Cette journée du mardi 11 mars est marquée par deux rendez-vous diplomatiques majeurs, avec des négociations entre délégations américaine et ukrainienne en Arabie saoudite, et un sommet des armées européennes à Paris.
Cette reprise du dialogue entre Kiev et Washington, organisée sur « terrain neutre », si l’on peut dire, a lieu 10 jours après l’épisode catastrophique de cette altercation face caméra, à la Maison Blanche, entre Volodymyr Zelensky et Donald Trump. Entre-temps, l’aide américaine à l’Ukraine a été suspendue. Ce fait majeur a déjà des conséquences sur le terrain pour les Ukrainiens, rendus « aveugles » en quelque sorte par l’arrêt du renseignement américain. Cela s’est traduit par une avancée russe notable dans la région de Koursk, en Russie, occupée par l’armée ukrainienne depuis l’été 2024. On a également observé une incursion dans la région de Soumy dans le nord-est de l’Ukraine, ce qui n’était pas arrivé depuis longtemps.
Kiev arrive en Arabie saoudite avec plusieurs propositions, à commencer par une « trêve dans les airs et en mer« , bien accueillie par les États-Unis. C’est la mesure phare de la diplomatie ukrainienne pour acter un pas en avant, réclamé par Washington, et tenter de retrouver une relation plus sereine avec la Maison Blanche. Lors de cette rencontre entre émissaires de haut niveau, Kiev espère pouvoir maintenir ses lignes rouges : pas de concessions territoriales à la Russie, pas d’interdiction de se réarmer, et pas d’obligations d’organiser des élections en plein conflit, alors que la Russie insiste depuis plusieurs semaines sur l’illégitimité du président Zelensky. L’Ukraine garde dans sa manche l’accord sur les minerais, que le dirigeant s’est dit prêt à signer avec les États-Unis en gage de sa bonne volonté.
Est-ce que ça suffira pour convaincre Washington ? Les derniers signaux diplomatiques sont plutôt positifs. Mais en mettant ses menaces à exécution, avec l’arrêt du renseignement notamment, Washington a mis une terrible pression sur Kiev. Rappelons les objectifs majeurs de Donald Trump : mettre fin au conflit le plus rapidement possible pour ne plus avoir à financer la guerre, trouver une forme, même symbolique, de « remboursement » de l’aide apportée depuis trois ans, pour brandir ce trophée à ses électeurs. Et puis renouer des relations avec la Russie, ce qui apparaît de plus en plus comme une priorité du président américain, dont le discours colle avec celui du Kremlin.
Ce mouvement de Donald Trump vers Vladimir Poutine a de quoi préoccuper les Européens et les pays membres de l’Otan, qui s’interrogent sur la fiabilité de l’allié américain en cas d’agression. C’est dans ce contexte que les responsables des plus grandes armées du continent et de l’alliance sont réunis à Paris. On compte 30 pays autour de la table, dont la France, le Royaume Uni, l’Allemagne, la Turquie ou la Pologne. Leur priorité immédiate : le soutien à l’Ukraine, avec des questions concrètes et urgentes à régler, si l’Europe devait pallier totalement le soutien américain. Et puis au menu également, dans un deuxième temps, l’organisation d’une éventuelle mission de maintien de la paix en Ukraine, si un cessez-le-feu devait intervenir.
À ce propos, un détail qui n’en est pas un : la volonté très relative de faire la paix du côté de la Russie. C’est une difficulté majeure évidemment, d’autant que Moscou joue sur du velours depuis trois semaines, avec un Donald Trump très conciliant, qui ne demande aucun engagement au Kremlin. Vladimir Poutine a d’ailleurs des raisons objectives de ne pas vouloir mettre fin au conflit, ou du moins pas totalement. L’économie de guerre et la mise au pas de la société, justifiées par la menace et l’ennemi à combattre, ont du bon pour un autocrate.