Ce tableau à l’histoire incroyable sera exposé au public au musée du Prado de Madrid pendant quelques mois grâce à la générosité de son propriétaire anonyme.
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Attribué à tort à un peintre méconnu, il avait failli être mis aux enchères pour 1 500 euros. Finalement authentifié, le tableau Ecce Homo du Caravage va être dévoilé lundi 27 mai à Madrid, où il sera exposé pour quelques mois au Prado.
Une toile d’une « valeur extraordinaire » marquée par une histoire hors du commun : voilà comment le célèbre musée madrilène décrit cette peinture vieille de 400 ans, qu’il prévoit de montrer au grand public jusqu’au mois d’octobre.
Une exposition rendue possible par la « générosité » de son nouveau propriétaire, qui a accepté de prêter l’œuvre temporairement, a expliqué le musée, sans dévoiler l’identité de cette personne.
Peint entre 1605 et 1609, cet Ecce Homo (« Voici l’homme » en latin) représente le Christ, les mains attachées et la tête ceinte d’une couronne d’épines, lors de sa présentation à la foule par le préfet romain Ponce Pilate, peu avant sa crucifixion.
Il s’agit de l’un des soixante tableaux au monde attribués au maître italien Michelangelo Merisi da Caravaggio, dit Le Caravage (1571-1610), spécialiste du clair-obscur et figure marquante de la peinture baroque.
Selon les experts, cette huile sur toile de petite taille a fait partie de la collection privée du roi Philippe IV d’Espagne, avant d’être exposée dans les appartements de son fils Charles II.
Léguée à la Real Academia de San Fernando, à Madrid, elle aurait été récupérée en 1823 par l’homme d’Etat et diplomate espagnol Evaristo Pérez de Castro en échange d’un autre tableau, avant d’être transmise à ses descendants. C’est finalement en 2021 que le tableau est sorti de l’oubli. Le prenant pour l’œuvre d’un disciple de José de Ribera, peintre espagnol du début du XVIIe siècle et grand admirateur du Caravage, une maison d’enchères madrilène l’avait mise à prix pour 1 500 euros.
Alerté par des experts, le Prado avait sonné l’alarme, en invoquant « des preuves documentées et stylistiques suffisantes » pour envisager que l’œuvre soit du Caravage. Dans la foulée, le ministère espagnol de la Culture avait bloqué l’opération. Une intervention in extremis aujourd’hui saluée par la communauté des historiens de l’art : après une analyse minutieuse, les spécialistes ont en effet établi que cet Ecce Homo était bel et bien une œuvre de l’artiste italien, explique le Prado.
Parmi les experts ayant participé à l’authentification de ce tableau décrivant l’une des scènes les plus connues de la Passion du Christ, figure Maria Cristina Terzaghi, professeure d’histoire de l’art à l’université italienne Roma Tre. Dans un entretien accordé à l’AFP en 2021, cette spécialiste du Caravage avait confié avoir « compris immédiatement qu’il pouvait s’agir d’un tableau très important », après avoir vu une image de la peinture envoyée par des amis antiquaires.
En le découvrant à Madrid, « je n’ai plus eu de doute », avait assuré l’universitaire, qui a expliqué depuis s’être basée sur les couleurs de la toile, la composition du tableau ou encore sur l’expressivité des visages pour établir son diagnostic. Avant d’être montré au Prado, qui a prévu une « installation individuelle spéciale » pour mieux le mettre en valeur, le tableau a été entièrement restauré, sous la houlette du spécialiste Andrea Cipriani.
Selon des médias espagnols, le tableau aurait été acheté 36 millions d’euros par son nouveau propriétaire, un citoyen britannique résidant en Espagne, et pourrait rester exposé au grand public après son passage au Prado.
Ecce Homo « ne va pas finir au domicile de son acheteur » car ce dernier souhaite qu’il rejoigne des « collections publiques, pour le moment, sous forme de prêt », a expliqué, au quotidien El Pais, Jorge Coll, responsable de la galerie qui s’est chargée de sa vente.
L’occasion pour les amateurs du Caravage de se replonger dans l’œuvre de ce peintre à la vie tumultueuse, lui-même oublié pendant trois siècles avant que son génie soit de nouveau reconnu à partir des années 1950.