Le week-end dernier, Kendrick Lamar avait triomphé aux Grammys, avec son titre « Not Like Us » dans lequel il s’en prend au rappeur Drake.

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Son show était aussi attendu que le choc entre les Chiefs et les Eagles : l’icône du rap californien Kendrick Lamar a marié la culture hip-hop avec les couleurs de l’Amérique, dimanche 9 février, lors du concert du Super Bowl. Sans oublier d’interpréter son morceau anti-Drake, dans une version légèrement édulcorée.
Devant les 80 000 spectateurs du Caesars Superdome de la Nouvelle-Orléans, et probablement plus de 100 millions d’Américains face à leur écran, l’enfant de Compton, banlieue défavorisée de Los Angeles, est devenu dimanche soir le premier artiste de hip-hop à assurer en solo l’incontournable concert de la mi-temps de la finale du championnat de football américain, après la performance collective des stars du rap Snoop Dogg, Dr Dre, Eminem – et déjà, Kendrick Lamar – en 2022.
Pour ce quart d’heure de gloire tardif du genre musical dominant aux États-Unis, il a enchaîné les classiques – Humble, DNA – et les morceaux de son dernier album GNX, comme Peekaboo ou Squabble Up. D’abord accroupi, casquette à l’envers sur la tête, sur le capot de cette Buick GNX qu’il affectionne, puis entouré de danseurs tournoyants vêtus de bleu, blanc et rouge, qui à un moment ont formé un drapeau des États-Unis.
Parmi les danseurs, on a vu rien de moins que la légende du tennis féminin Serena Williams, une autre enfant de Compton. Puis, Kendrick Lamar a entamé le duo annoncé avec sa compère SZA, l’une des grandes voix de la scène R&B actuelle, toute de cuir rouge vêtue.
Certains s’attendaient à une charge contre Donald Trump, présent dans les tribunes pour une partie du match, après trois semaines de mesures radicales depuis le retour du républicain à la Maison-Blanche. Peut-être Kendrick Lamar a-t-il abordé le sujet quand il a lancé : « La révolution sera télévisée, vous avez choisi le bon moment, mais pas le bon gars. »
Mais le rappeur de 37 ans, considéré comme l’un des meilleurs de sa génération, a préféré envoyer un message plus symbolique sur le manque de reconnaissance de la culture hip-hop et la place des Afro-Américains dans la société des États-Unis, à travers un dialogue inattendu avec un « Oncle Sam » incarné par l’acteur Samuel L. Jackson. « Non, non, non, noooooooon. Trop bruyant, trop inconscient, trop ‘ghetto’. M. Lamar, est-ce que vous savez vraiment comment on fait ? », lui lance « Oncle Sam » après les premiers vers. Malgré les remontrances, Kendrick Lamar a continué de rapper, danser et marcher vers l’avant, une image d’émancipation à laquelle il se réfère souvent dans ses textes.
Pendant le show, un manifestant est parvenu à brièvement monter sur la voiture pour brandir un drapeau palestinien marqué des mots « Soudan » et « Gaza ». Une irruption dont la Ligue de football nord-américain (NFL) et la société Roc Nation, qui produit le concert, ont dit tout ignorer.
Mais tout le monde se demandait surtout si Kendrick Lamar interpréterait Not Like Us, son hit viral et au vitriol, plein de mépris et de haine pour son rival Drake, qu’il accuse même dans des vers acérés et outranciers de pédophilie (Drake n’a jamais été poursuivi pour de tels faits). Après avoir entretenu un faux suspense – le sample du titre revenait de temps à autre – Kendrick Lamar a craché son venin lors de la soirée la plus regardée à la télévision aux États-Unis, une semaine après avoir remporté cinq Grammy Awards grâce à ce tube.
« Mais vous savez qu’ils aiment les plaintes en justice », a-t-il ironisé, en allusion aux poursuites en diffamation lancées par le rappeur canadien devant les tribunaux. Probablement pour éviter d’alourdir le dossier, il a évité de prononcer le mot « pédophile ». Mais il n’a pas épargné son rival des vers les plus cruels et polémiques de la chanson qui disent presque la même chose de manière plus détournée.
Taylor Swift, qui est en couple avec un des joueurs vedettes de Kansas City, Travis Kelce, a été sifflée lorsque son visage est apparu sur les écrans géants du Caesars Superdome de La Nouvelle-Orléans lors d’une pause. Suite à quoi, Donald Trump s’est moqué de la chanteuse Taylor Swift, qui avait soutenu la candidate démocrate Kamala Harris pendant la campagne électorale.
Donald Trump était aussi venu assister à la finale du championnat de foot américain, premier président en exercice à être présent lors de cette grand-messe de la culture américaine. Même s’il a quitté le stade peu après la deuxième mi-temps, il ne s’est pas privé de chahuter la reine de la pop. « La seule qui a eu une nuit plus difficile que les Kansas City Chiefs a été Taylor Swift », a-t-il écrit sur le réseau Truth Social. « Elle a été HUEE […] MAGA a la rancune tenace », a-t-il ajouté, en référence à son mouvement politique « Make America Great Again ».
Le président américain avait aussi auparavant partagé un post d’un autre compte mettant en lumière le contraste entre les huées visant Taylor Swift et les acclamations dont il a bénéficié lorsque son visage est apparu à l’écran pendant l’interprétation de l’hymne américain : « Trump reçoit des bravos massifs pendant que Taylor Swift est huée – le monde est en train de guérir. »