Le fonds public d’investissement saoudien, partenaire du circuit féminin de tennis depuis plusieurs années, a annoncé, jeudi, qu’il allait financer « jusqu’à douze mois » de congé maternité.
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Le choix de la date de l’annonce était-il prémédité ? À deux jours de la journée internationale des droits des femmes, le circuit féminin professionnel de tennis (WTA) et le fonds public d’investissement saoudien (PIF) ont annoncé conjointement, jeudi 6 mars, que ce dernier allait financer « jusqu’à douze mois » de congé maternité aux joueuses. Engagée dans une politique de soft power à travers le sport, l’Arabie saoudite investit depuis plusieurs années sur le circuit WTA. Ce congé maternité est la dernière de ses initiatives.
De quoi s’agit-il ?
Le programme, financé par le fonds souverain saoudien, proposera un congé maternité rémunéré « jusqu’à douze mois », à « plus de 320 joueuses » du circuit féminin. En outre, celles qui adoptent un enfant, recourent à la gestation pour autrui (GPA) ou dont la partenaire donne naissance à un enfant pourront prétendre à un congé parental allant jusqu’à deux mois, a précisé la WTA dans un document transmis à l’AFP. Enfin, le fonds public d’investissement saoudien pourra également financer les traitements contre l’infertilité.
Cela « facilitera la tâche aux joueuses qui veulent concilier leur carrière et leurs aspirations à fonder une famille », s’est félicitée Victoria Azarenka, ex-numéro 1 mondiale et maman depuis 2016, citée dans le communiqué en sa qualité de représentante du conseil des joueuses du circuit WTA. Plusieurs joueuses de premier plan ont interrompu leur carrière pour donner naissance, avec un impact inégal sur la suite de leur carrière.
La Belge Kim Clijsters a par exemple remporté deux US Open et un Open d’Australie après avoir accouché, Serena Williams a quant à elle atteint quatre finales de Grand Chelem après être devenue maman. En revanche, de retour sur les courts depuis un an et demi après sa maternité, l’ancienne numéro 1 mondiale Naomi Osaka n’a participé qu’à une modeste finale(d’un tournoi WTA 250).
Qui peut en bénéficier ?
Pour prétendre au programme proposé par le PIF, les joueuses devront avoir participé à au moins huit tournois WTA au cours des douze mois précédant leur demande, ou au moins 24 tournois WTA au cours des trois dernières années. Condition supplémentaire : au moins la moitié des compétitions disputées devront être d’un niveau supérieur ou égal au WTA 250.
Enfin, « les joueuses devront avoir demandé et reçu à titre provisoire » un classement protégé, qui leur permettra d’intégrer plus facilement le tableau final des tournois qu’elles disputeront au retour de leur congé maternité, souligne la WTA. Dans le cas où une joueuse met un terme à sa carrière après son congé maternité, elle ne sera pas tenue de rembourser les sommes versées par le PIF alors qu’elle était enceinte, détaille encore la WTA. Cette dernière n’a pas mentionné la date d’application du programme.
À combien s’élèvera l’indemnisation mensuelle de congé maternité ?
Sollicités par l’AFP, le fonds souverain saoudien et la WTA n’ont pas souhaité indiquer la somme investie par l’Arabie saoudite pour financer ce programme. Pour des raisons de « confidentialité », la WTA n’a pas non plus voulu dévoiler le montant versé chaque mois aux joueuses en congé maternité ou en congé parental. Mais les versements mensuels seront « généreux » et leur montant sera forfaitaire, a précisé l’instance. Quant aux financements des traitements contre l’infertilité, ils « suffiront à couvrir les coûts associés à plusieurs traitements et soins médicaux », a-t-elle précisé.
Un dispositif similaire existe-t-il dans d’autres sports ?
Bien que le PIF et la WTA vantent une « initiative pionnière », plusieurs autres sports ont déjà mis en place des programmes similaires. Les équipes féminines du World Tour, l’élite du cyclisme mondial, sont tenues depuis 2020 de verser à leurs membres 100% de leur salaire les trois premiers mois de leur congé maternité, et 50% les cinq mois suivants. Dans le football, les clubs affiliés aux 211 fédérations membres de la Fifa doivent prévoir un congé maternité « d’au moins quatorze semaines » pour les joueuses, rémunéré « au minimum les deux tiers du salaire contractuel ».
En France, les 14 clubs de handball français de première division ont eux signé en 2021 une convention collective qui prévoit jusqu’à un an de maintien de salaire pour les joueuses en congé maternité. Les 24 formations de basket des deux premières divisions nationales leur ont emboîté le pas trois ans plus tard, en juillet 2024.
Quelle place occupe l’Arabie saoudite dans le tennis féminin ?
Alors que l’Arabie saoudite a été critiquée par certaines figures du tennis comme Chris Evert ou Martina Navratilova pour sa politique en matière de droits des femmes, le royaume a multiplié les investissements dans le milieu de la petite balle jaune ces dernières années. Un « partenariat pluriannuel » entre le PIF et la WTA a été signé en mai 2024, le fonds public a accolé son nom aux classements WTA et ATP. En outre, Ryad, la capitale saoudienne, a accueilli pour la première fois en novembre les Finales WTA, un prestigieux tournoi qui réunit les huit meilleures joueuses de l’année écoulée. La compétition s’y tiendra au moins jusqu’en 2026.
Si l’Américaine Coco Gauff avait admis avant l’édition 2024 avoir des « réserves » à l’idée de jouer en Arabie saoudite, à qui les ONG occidentales reprochent régulièrement de violer les droits humains, elle s’était réjouie après sa victoire en finale d’avoir passé un « séjour fantastique, beaucoup plus amusant » qu’imaginé.